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dimanche 29 janvier 2012

B. - ÉTUDE GLOBALE

1) Action sur le sujet normal. - Classiquement, elle est très peu importante à doses modérées et, à fortes doses, elle expose aux accidents d’hypervitaminose D. HOUET, en 1951, ayant particulièrement étudié ce problème, écrit qu’il n’observe pas d’action sur le calcium et le phosphore fécaux chez le sujet normal après administration de vitamine D mais il observe néanmoins une augmentation du calcium et du phosphore urinaires. Nous avons effectivement

observé, avec GENTIL et HENNEMANNE, que chez nos sujets normaux, l’action de la vitamine D était peu importante, mais elle est cependant notable. C’est ainsi que nous avons noté que la calcémie augmentait de 3,1%, la phosphatémie augmentait de 20%, ce qui est tout de même assez important, la calciurie augmentait de 12%, la phosphaturie de 5,5% et la diurèse, comme nous l’avons déjà dit, de 38%. Cette action associée sur la phosphatémie et la phosphaturie aboutit à une diminution de la clearance phosphatée qui atteint 21%, fait qui mérite d’être signalé.

Quelle interprétation donner à ces observations ? Nos sujets témoins étaient tous des nourrissons de 2 à 14 mois. Certes, ils n’avaient aucun signe ni clinique, ni radiologie, ni biologie de rachitisme. Mais tout se passe un peu comme si ces nourrissons étaient à la limite de la carence et l’on peut se demander une fois de plus où finit le normal et où commence le pathologique.

2) Mécanisme de la carence. - On est alors amené à envisager le mécanisme du rachitisme sous un angle assez différent de l’angle sous lequel il est en général considéré par les auteurs classiques.

Une première conséquence est soulignée : tout au long de l’étude de la physiologie de la vitamine D, on se heurte à la parathormone. Il est donc impossible, semble-t-il d’échafauder une théorie correcte du rachitisme sans faire intervenir le fonctionnement des parathyroïdes.

Un deuxième fait doit être rappelé : la carence en vitamine D peut fort bien se manifester, au moins à un stade précoce, sans lésions osseuses. En faveur de cette conception, s’inscrivent les travaux de HARRISSON qui, en 1958, obtient chez l’animal privé de vitamine D, mais avec un régime équilibré en calcium et en phosphore, un déséquilibre purement biologique caractérisé par une hypocalcémie et une normophosphatémie, sans aucun signe clinique ni radiologique de rachitisme. Ce n’est qu’à la longue, par suite de la diminution du produit de HOWLAND-KRAMER au-dessous de 3000, qu’apparaissent les signes osseux caractéristiques de la dystrophie rachitique. Ceci doit être rapproché des constatations que nous avons souvent faites chez le nourrisson et en particulier des états hypocalcémiques fréquents entre 2 et 5 mois chez le nourrisson carencé en vitamine D. Dès lors, la carence en vitamine D peut évoluer selon deux modes selon que la parathormone parvient ou non à relever la calcémie, primitivement abaissée. On peut observer soit un rachitisme modéré où seuls joueront l’abaissement du produit Ca x P (produit de HOWLAND-KRAMER) et d’autre part l’action directe de la carence vitaminique sur l’os et où les signes osseux seront seulement métaphysaires; d’autre part, un rachitisme grave comportant une ostéomalacie étendue à tout le squelette et où, aux mécanismes précédents, viendra s’ajouter la réaction parathyroïdienne qui décalcifiera l’os, utilisant le calcium à faire, ou à tenter de faire, remonter la calcémie et le phosphore à augmenter la phosphaturie, cependant que s’abaissera la phosphatémie.

3) Action de la vitamine D chez le rachitique. — Classiquement la vitamine D chez le rachitique a, comme action essentielle, de relever la phosphatémie et l’on estimait que ce relèvement de la phosphatémie avait pour risque corollaire, un abaissement de la calcémie.

Il ressort de ce que nous avons vu que cette action est fort peu probable car la vitamine D n’agit en aucun point directement sur les phosphates, sauf au niveau du rein, où précisément la phosphaturie a plutôt tendance à augmenter. Et l’on conçoit mal que cette action hyperphosphaturique puisse par ailleurs entraîner une élévation de la phosphatémie.

Il est plus simple et probablement plus exact de faire intervenir, là encore, les parathyroïdes. Le rôle essentiel de la vitamine D va être, en fait :

a - d’améliorer le produit de HOWLAND-KRAMER (Ca x P) en relevant directement la calcémie et indirectement la phosphatémie,

b - d’améliorer la réceptivité du squelette aux sels minéraux ce qui risquera d’abaisser temporairement la calcémie.

c - de freiner la réaction parathyroïdienne en relevant la calcémie et il est vraisemblable que ce sera là le mécanisme essentiel de la remontée de la phosphatémie.

Mais ceci nous amène à un point crucial autour duquel nous tournons déjà depuis un certain temps : la vitamine D est-elle hypo ou hypercalcemiante ?

4) Action de la vitamine D sur la calcémie. - On relève à se sujet les faits les plus contradictoires dans la littérature. Classique ment les données étaient simples : les doses minimes anti-rachitiques étaient hyperphosphatémiantes, d’où risques d’hypocalcémie et les doses fortes étaient avant tout hypercalcémiantes. PINCUS et GITTL EMAN, en 1954, constatent que de petites doses, de l’ordre de 6oo U, chez le nouveau-né au lait de vache entraînent une hypocalcémie et une hyperphosphatémie. Ils pensent que la vitamine D est capable d’inhiber la parathormone qui tendrait à remonter l’hypocalcémie physiologique des premiers jours et, dans les mêmes conditions, ils trouvent des différences importantes entre les enfants au lait de vache et les enfants au sein.

Dans un tout autre domaine, on connaît par ailleurs la possibilité de tétanie, peut-être même de morts subites, avec hypocalcémie intense à la suite d’administration brutale de fortes doses de vitamine D. Sur le plan expérimental, CRAWFORD et GRIBETZ ont observé que chez les rats parathyroïdectomisés, donc avec une hypocalcémie, et recevant un régime sans calcium, la vitamine D à fortes doses était capable d’entraîner une tétanie sévère et la mort.

Nous avons été amené nous-même avec Paul BERTHAUX à observer que dans certaines conditions expérimentales, l’administration de vitamine D aux rats parathyroïdectomisés était également capable dans certains cas d’entraîner une mort rapide, beaucoup plus rapide en tout cas que chez les animaux ne recevant pas de vitamine D.

Plutôt que de chercher à expliquer l’action hyper ou hypocalcémiante par une question de doses, il paraît beaucoup plus satisfaisant de faire jouer trois éléments : d’une part, le régime, d’autre part, l’état de minéralisation du squelette et enfin une fois de plus l’état de fonctionnement des parathyroïdes.

En ce qui concerne le RÉGIME, il est vraisemblable qu’un régime pauvre en calcium, ou contenant un calcium difficilement absorbable, a pour effet de faire prédominer l’action osseuse de la vitamine D sur l’action intestinale dont nous avons vu qu’elle exigeait toujours un temps de latence plus ou moins long. Il est alors possible d’imaginer que l’administration de vitamine D à des sujets ainsi carencés soit capable d’entraîner des risques d’hypocalcémie étant donné que l’action prédominante sera dans ce cas une fixation du calcium sur l’os. Les nouveaux-nés étudiés par PINCUS sont dans une période où ils doivent s’adapter au lait de vache et il est probable que dans leurs premiers jours, ils se trouvent dans un état de mauvaise absorption calcique ; la vitamine D qu’on leur apporte risque, là encore, d’agir sur l’os avant d’améliorer leur absorption intestinale du calcium. Finalement d’ailleurs, PINcus et GITTLEMEN ont constaté qu’au bout d’un certain temps après ce risque d’hypocalcémie ou même après une hypocalcémie quelquefois nette, la calcémie remontait à la normale.

L’ÉTAT DE MINÉRALISATION DU SQUELETTE représente le deuxième élément. Nous avons vu que le calcium était capable d’être mobilisé à partir du squelette par la vitamine D ou par la parathormone. Ce calcium mobilisable correspond à une fraction bien spéciale qui est souvent considérée comme le calcium échangeable de l’os. Si l’os est très déminéralisé, ce calcium échangeable est nul ou très réduit.

La vitamine D, logiquement, tendra à reconstituer ce stock échangeable avant d’y puiser pour chercher à augmenter la calcémie. Si l’on donne des doses minimes de vitamine D, seul le premier effet se manifestera mais il sera toujours très amorti, surtout si ces doses sont minimes et répétées laissant tout le temps à l’action intestinale de se manifester et par conséquent, d’augmenter la calcémie. Si l’on donne des doses fortes de vitamine D, l’effet sera plus brutal et à plus ou moins long terme, il aboutira à une hypercalcémie car l’os aura eu suffisamment de vitamine D pour reconstituer son stock calcique et sera capable secondairement d’en rejeter dans la circulation. Mais on conçoit d’emblée qu’il y aura des risques très importants d’hypocalcémie transitoire, risques qui pourront être dans certains cas brutaux et dont les conséquences seront toujours imprévisibles.

Le FONCTIONNEMENT PARATHYROIDIEN représente le troisième élément. L’incidence de l’hypoparathyroïdie éventuelle ne joue vraisemblablement que si le squelette. est déminéralisé. Certes AXELROD (1959) a publié des cas d’hypoparathyroïdie où la vitamine D est incapable d’augmenter la calcémie. En fait, si le squelette est normal, la vitamine D ne risque guère d’entraîner une hypocalcémie puisque les exigences osseuses sont minimes ou nulles. Mais si le squelette est déminéralisé et que par ailleurs le sujet est hypoparathyroïdien (ce qui correspond au cas du rachitisme hypocalcémique) de fortes doses de vitamine D risqueront d’entraîner un mouvement du calcium dans un seul sens, de la circulation vers l’os et par conséquent d’accentuer l’hypocalcémie.

En conclusion, il semblerait logique de redouter une action hypocalcémiante de la vitamine D d’une part si le tube digestif est pauvre en sels de calcium, d’autre part si le squelette est très déminéralisé, surtout s’il s’y associe une insuffisance parathyroïdienne.

En fait, tout est remis en cause par certains travaux récents :

RAOUL et GOUNELLE en 1959, frappés par le fait que l’action sur la calcémie de la vitamine D paraît indépendante de l’action antirachitique, ont cherché à tester l’action de nombreux lots de différentes préparations de vitamine D2 et D3, d’une part sur l’animal rachitique, d’autre part sur l’animal parathyroïdectomisé et, enfin, sur l’homme normal. Or ils ont eu la surprise de constater avec Mlle LE BOULCH et Mlle MARNAY, tout récemment, que certains lots avaient toujours une action hypercalcémiante que d’autres lots au contraire avaient toujours une action hypocalcémiante, et que cette action était indépendante de toute impureté car elle persistait après purification extrême du produit. Reprenant alors différents stérols à action vitaminique, ils leur font subir des cristallisations différentes en variant les conditions physico-chimiques, et dans ces conditions ils ont pu constater qu’en partant d’un même corps, les différents types de cristallisation successifs impliquaient une action tantôt hyper, tantôt hypocalcémiante d’amplitude exactement superposable. Ainsi, les préparations possédant des cristaux lamellaires avaient-elles toujours une action hypercalcémiante, alors que les préparations possédant des cristaux en aiguilles avaient des propriétés hypocalcémiantes. Ces constatations demandent évidemment confirmation, mais si elles se vérifient, elles remettent en question tous les modes d’action de la vitamine D en particulier sur la calcémie.

5) Vitamine D et parathormone. - Il est habituel de chercher à comparer les actions de la vitamine D et de la parathormone, dans certains cas de les opposer, dans d’autres cas de les associer.

P. COURVOISIER (1959) et les différents auteurs qui se sont attachés ces dernières années à éclaircir la physiologie parathyroïdienne aboutissent à des conclusions qui appellent quelques nuances.

Sur l’intestin, l’action de la vitamine D est certainement supérieure à celle de la parathormone bien que cette dernière facilite probablement l’absorption du calcium. Un synchronisme d’action n’est pas exclu. DOWDLE et SCHACHTER (1960) constatent que la parathyroïdectomie diminue l’absorption intestinale du calcium mais cette action n’apparaît pas si l’animal est carencé en vitamine D au préalable.

Sur le rein, la parathormone est toujours hyperphosphaturique si le tubule rénal est capable de répondre à la stimulation parathyroïdienne. La vitamine D, nous l’avons vu, est tantôt hypo, tantôt hyperphosphaturique. Il paraît y avoir un antagonisme entre la parathormone et la vitamine D en cas d’hyperparathyroïdisme. CRAWFORD (1957) constate qu’en cas de réaction parathyroïdienne physiologique, il y a augmentation de cet antagonisme entre la vitamine D et la parathormone. HARRISSON (1958) signale également que la réponse du rein à la parathormone est faible ou nulle en cas de carence en vitamine D. Nous voyons donc qu’il y a là une nouvelle cause d’erreur pour le test d’ELLSWORTH à la parathormone, l’action de cette dernière n’apparaissant chez l’animal carencé en vitamine D que si la vitamine D est administrée avant l’injection de parathormone. Ce test qui était déjà la source de nombreuses erreurs voit encore surgir une difficulté supplémentaire pour son interprétation.

Sur l’os, la parathormone a toujours une action déminéralisante jamais constructrice. Nous avons déjà vu que la vitamine D pouvait avoir une action sur la trame protéique de l’os et plus spécialement sur la polymérisation des mucopolysaccharides. Il s’agirait d’une action totalement opposée à celle de la parathormone. Ces faits ont été confirmés par GERSH en 1952. Dans d’autres cas, il est indiscutable que la vitamine D soit capable de mobiliser le calcium osseux.

Sur la calcémie enfin, la parathormone est touj ours hypercalcémiante, la vitamine D, nous l’avons vu, est à l’origine de discussions et de problèmes qui sont loin d’être résolus.

En conclusion, ce bref parallèle garde un très grand intérêt. Il met en lumière le fait, qu’à côté de la parathormone secrétée en principe régulièrement sans influences extérieures autres que les variations de la calcémie et de la phosphatémie, mais dont l’action sur l’équilibre phosphocalcique se fait toujours dans le même sens, la vitamine D dont l’apport peut être sujet à de grandes variations, a des modalités d’actions analogues mais beaucoup plus nuancées, sachant selon les cas se manifester en synergie ou en opposition avec la parathormone.

6) Action toxique de la vitamine D. - Nous ne reviendrons pas sur les diverses manifestations de l’hyperavitaminose D. Les travaux récents se sont essentiellement attachés à en préciser la physiopathologie.

A côté des intoxications manifestes par apport exagéré, il faut faire une part aux hypercalcémies idiopathiques qui amènent à se demander si dans certains cas, il n’y aurait pas une surproduction endogène de substances proches de la vitamine D mais possédant surtout une action hypercalcémiante. La constatation dans ces cas d’une cholestérolémie anormalement élevée serait en faveur de cette hypothèse, le cholestérol et ses dérivés pouvant d’ailleurs dans certains cas, comme l’ont montré certains travaux actuels, avoir des propriétés hypercalcémiantes.

Dans un autre domaine, celui des lésions dues à l’hyperavitaminose D, des travaux tout récents de GILLMAN (1960) soulignent que les lésions observées sont indépendantes de l’hypercalcémie de laquelle on a trop tendance à les rapprocher. Ainsi les minéralisations aortiques, myocardiques et coronariennes que l’on observe au cours de l’hyperavitaminose D persistent et évoluent alors que la calcémie est revenue à la normale après une élévation initiale. Cet auteur insiste sur l’importance de l’élévation des mucoprotéines sériques et tissulaires qui paraîssent être les témoins de l’hyperavitaminose.

On sait d’autre part que toute minéralisation a justement pour substrat les mucopolysaccharides retrouvés à la fois dans la trame protéique du squelette, dans les cavités urinaires au cours des lithiases et, d’une façon générale, partout où se produit une minéralisation physiologique ou pathologique.

Reprenant les travaux de DE LUCA en 1958 sur l’action inhibitrice de la vitamine D vis-à-vis du métabolisme des mitochondries rénales, SCARP ELLI tout récemment, à la suite de très belles études histochimiques, reconstitue ainsi la physiopathologie des lésions rénales de 11 hyperavitaminose D : A l’action toxique du calcium sur les mitochondries (SLATER 1952, HARMAN 1956) s’ajoute l’action directe de la vitamine D qui, ajoutés in vitro à une suspension de ces mitochondries, se montre capable d’inhiber leur métabolisme en bloquant un chaînon indispensable à la transformation de l’énergie cellulaire en une forme utilisable par la cellule. Il s’agirait semble-t-il d’une réduction des activités diaphorasiques diphosphonucléotides et triphosphonucléotides. Le blocage du métabolisme énergétique des diphosphonucléotides aboutit à une accumulation d’acide citrique, ce qui nous ramène, comme on le pense, à l’action de la vitamine D sur le cycle citrique. Peu de temps après le début des altérations des mitochondries, apparaîssent un grand nombre de granules PAS positifs dans le cytoplasme tubulaire, puis dans la lumière du tube. Les mitochondries altérées se montrent incapables de résorber ces granules, contrairement à ce qui se passe normalement. Ainsi s’accumule dans les cellules tubulaires et dans la lumière des tubes, une substance essentiellement apte à la minéralisation. Cependant que l’accumulation d’acide citrique forme avec le calcium, un complexe également favorable à cette minéralisation.

Ainsi se trouve démontré le mécanisme intime d’un des aspects de l’action de la vitamine D sur le rein et probablement sur d’autres tissus.









A. – ÉTUDE ANALYTIQUE

1) Action intestinale. - Nous passerons rapidement tout d’abord sur les faits solidement établis. C’est ainsi qu’il est parfaitement connu que la vitamine D augmente l’absorption intestinale du calcium par une action directe, et qu’elle augmenterait l’absorption intestinale des phosphates par une action indirecte du fait de la disparition rapide du calcium de la lumière intestinale empêchant la formation de phosphates tricalciques qui s’oppose elle-même à l’assimilation des phosphates. A l’appui de cette théorie, on cite couramment que la vitamine D n’a aucune action sur l’absorption des phosphates si l’animal étudié est soumis à un régime sans calcium. Pourtant cette absence d’action directe de la vitamine D sur l’absorption des phosphates n’est pas admise par tous. C’est ainsi que CARLSSON (1954) estime que la vitamine D augmente l’absorption des phosphates chez les animaux carencés en calcium et qu’elle aurait une influence sur l’absorption des phosphates si le rapport alimentaire calcium sur phosphore est assez bas.

HARRISSON lui-même, en 1954, estime que la vitamine D est capable d’augmenter l’absorption intestinale des phosphates.

Nous ne reviendrons pas sur cette action de la vitamine D sur l’absorption des phosphates en soulignant une fois de plus que l’immense majorité des auteurs refuse à la vitamine D la possibilité d’agir directement sur elle.

En ce qui concerne l’absorption du calcium, un premier fait nouveau a été apporté par LINDQUIST, par CREMER et par HARRISSON (1951), ces auteurs affirment qu’il existe deux modes d’absorption du calcium au niveau de l’intestin. Un premier mode localisé au segment supérieur du grêle consiste en une absorption passive ; un deuxième mode plus bas situé serait lui un mode d’absorption actif lié à des processus enzymatiques. Bien entendu, la vitamine D n’agirait que sur ce deuxième type d’absorption intestinale du calcium. Les modalités d’action de la vitamine D à ce niveau ne sont pas encore parfaitement établies. La majorité des auteurs estime qu’il ne s’agit pas d’une action locale. HARRISSON et LINDQUIST (1952) en utilisant le Ca constatent que la vitamine D n’influence l’absorption du calcium qu’au bout de plusieurs heures et, fait important, même si elle est administrée par voie parentérale, ce qui semble éliminer l’action locale. Les différences d’absorption du Ca n’apparaissent de toutes façons qu’au bout de plusieurs heures entre les rats qui reçoivent ou qui ne reçoivent pas de la vitamine D. Ceci est donc en faveur d’un processus relativement complexe qui reste encore à déterminer dans ses modalités. Dans le même domaine, HARRISSON (1952) constate que la vitamine D n’augmente l’absorption intestinale du Ca 45 qu’au bout de 24 heures ; il en déduit, comme nous l’avons déjà vu, qu’il s’agit de processus métaboliques complexes et d’autre part, qu’au bout de ce temps, le calcium est déjà parvenu dans la partie basse du grêle. LINDQUIST (1951) constate également que l’effet de la vitamine est relativement limité, toujours en employant le Ca 45. Il démontre que l’action n’apparaît qu’à partir de la 4e à la 12e heure après son administration, qu’elle est maximum au bout de la 6oe à la 72e heure, et qu’elle diminue au bout du 9e jour, devenant tout à fait nulle au i6e jour.

Un troisième fait dans ce domaine est apporté par SCHACHTER en 1960, qui, confirmant les deux types d’absorption dont nous avons déjà parlé, constate que l’absorption active, sur laquelle seule la vitamine D agirait, est inhibée par l’azote et par le 2,4-dinitrophénol; il en déduit qu’il s’agirait d’une phosphorylation oxydative et que par conséquent la vitamine jouerait un rôle essentiel dans ce processus enzymatique.

DOWDLE et SCHACHTER tout récemment en 1959, estiment que cette absorption active du calcium est directement commandée par les besoins de l’organisme en calcium et qu’elle augmente considérablement en cas de régime pauvre en calcium mais seulement en présence de vitamine D. CREMER confirme que cette dernière joue sur l’absorption de composés calciques non absorbables par simple diffusion.

La vitamine D apparaît donc jouer un rôle essentiel sur l’adaptation de l’absorption calcique aux besoins mais n’agirait pas sur l’absorption grossière, passive, du calcium dans la partie haute de l’intestin. DODWLE et SCHACHTER estiment que sur ce point, il existe vraisemblablement une synergie entre la vitamine D et la parathormone car après parathyroïdectomie, cette absorption active de la partie basse de l’intestin diminue considérablement.

Enfin, la vitamine D serait capable d’agir sur d’autres absorptions et c’est ainsi que HENNEMAN (1956) signale qu’elle augmente l’absorption intestinale de l’azote, du sodium, du potassium et sur- tout du magnésium.

On peut retenir de cet ensemble de travaux particulièrement complexes et quelquefois contradictoires que cette action intestinale n’est jamais rapide et qu’en aucun cas, elle n’est capable de remonter rapidement la calcémie ; les autres effets de la vitamine risquent donc presque toujours de précéder cette action intestinale sur l’absorption du calcium.

2) Action rénale de la vitamine D. - Cette action sur le rein de la vitamine D est suspectée depuis longtemps. Dès 1949, ALBRIGHT signalait son action hyperphosphaturique et peu de temps après, JUNXIS observait la disparition de l’hyperamino-aci-durie chez les rachitiques traités par la vitamine D.

a) ACTION SUR LA PHOSPHATURIE. -Avec ALBRIGHT déjà cité, BRULL en 1949 signale l’action hyperphosphaturique de la vitamine D mais les controverses n’allaient pas tarder à apparaître.

Les premières contradictions sont apportées par HARRISSON et KLEIN : le premier estime que la vitamine D agit uniquement en diminuant la réabsorption tubulaire des phosphates ; le second estime que, dans certaines circonstances, la vitamine D augmente la filtration glomérulaire des phosphates.

Mais surtout, HARRISSON (1954) note que, chez le chien rachitique, la vitamine D, contrairement à ce qui avait été dit jusque là, augmente la réabsorption tubulaire et a par conséquent une action hypophosphaturique. STADLER (1956) apporte quelques nuances aux conceptions jusque là établies : il observe bien après traitement une hyperphosphaturie chez le sujet rachitique mais comparant cette action chez le rachitique à l’action observée chez les sujets hypocalcémiques qui, au départ, ont une phosphaturie plus basse, il constate chez ces sujets hypocalcémiques, une beaucoup plus forte réponse phosphaturique que chez les sujets rachitiques non hypocalcémiques. Il déduit de ces constatations que vraisemblablement la vitamine D, dans son action sur le rein, est en relation étroite avec la parathromone.

Avec GENTIL et HENNEMANNE, nous avons constaté que la vitamine D pouvait avoir deux types d’action rénale en ce qui concerne l’élimination des phosphates. Chez les rachitiques qui, au départ, sont normocalcémiques et hypophosphatémiques et par conséquent chez lesquels, il est logique de penser qu’il existe une forte réaction parathyroïdienne, la vitamine D a, dans l’ensemble, diminué l’élimination urinaire des phosphates. Par contre, chez les rachitiques primitivement hypocalcémiques et normophosphatémiques, chez lesquels il est permis de suspecter une insuffisance parathyroïdienne relative, nous avons constaté que l’administration de vitamine D, dans l’ensemble, augmentait l’élimination urinaire des phosphates.

Il apparaît donc clairement que, selon les modalités et l’intensité du fonctionnement parathyroïdien, la réponse phosphaturique à la vitamine D peut parfaitement être opposée, un peu comme si la vitamine D perdait son activité sur un tubule déjà fortement sollicité par la parathormone.

b) ACTION SUR LA CALCIURI E. - En ce qui concerne la calciurie, il est classique d’admettre que la vitamine D n’a pas d’action.

On pensait généralement avec ALBRIGHT en 1949, que l’augmentation de la calciurie observée après traitement par la vitamine D était liée à l’élévation de la calcémie. Mais depuis quelques années, certains auteurs se sont inscrits en faux contre cette assertion. ALBRIGHT lui-même, LEIFER et HOLLANDER, HOWARD (1953) LITVAK et MOLDAWER (1958) constatent que dans certains cas d’hypoparathyroïdie, la vitamine D entraîne une hypercalciurie sans élévation parallèle de la calcémie ou précédant cette élévation de la calcémie. Ils estiment donc que la vitamine D peut, dans certains cas, s’opposer à la réabsorption tubulaire du calcium et cette opinion semble étayée par le fait qu’ils n’observent jamais cet effet sur la calciurie chez les pseudohypoparathyroïdiens dont l’inertie tubulaire constitue la seule et fragile caractéristique.

Là encore avec GENTIL et HENNEMANNE, nous avons constaté deux types de réponses chez les rachitiques. Considérées globalement dans l’ensemble des rachitiques étudiés, les calciuries baissent malgré une nette tendance à l’augmentation de la calcémie. Mais si l’on considère les différentes catégories dont nous avons déjà parlé, chez les rachitiques primitivement hypocalcémiques et normophosphorémiques, nous avons presque toujours constaté un effondrement de la calciurie alors que chez les sujets primitivement normocalcémiques et hypophosphorémiques, où, comme nous l’avons déjà dit, il est permis de supposer qu’il existe une réaction hyperparathyroïdienne, nous avons au contraire presque toujours constaté une élévation notable de la calciurie.

Ces constatations sont opposées à celles d’ALBRIGHT et de LITVAK et MOLDAWER chez les hypoparathyroïdiens. Mais il ne faut pas oublier qu’au départ, il existe une différence considérable entre les deux types de malades étudiés et d’autre part, dans les thérapeutiques administrées. En particulier, ces auteurs ont toujours donné du calcium avec la vitamine D ; chez nos rachitiques hypocalcémiques et normophosphatémiques, nous avons également constaté que la vitamine D associée au calcium n’a pas d’action hypocalciurique. Il semble que l’association au calcium évite l’hypocalciurie et peut- être même provoque dans certains cas une hypercalciurie.

c) AUTRES ACTIONS RÉNALES. - Il existe d’autres actions rénales de la vitamine D sur lesquelles nous passerons très vite. Nous n’avons rien de nouveau à dire à propos de l’action sur l’amino-acidurie des rachitiques; on sait que l’administration de vitamine D fait régresser très rapidement dans presque tous les cas l’hyperamino-acidurie constatée chez ces malades.

ALBRIGHT signale également que la vitamine D est capable d’augmenter le pH urinaire chez le rat rachitique ; ceci est à rapprocher des constatations de HARRISSON et d’un certain nombre d’auteurs sur l’action de la vitamine D sur la citraturie. Mais nous reviendrons sur ce sujet lorsque nous parlerons de l’action de la vitamine D dans le cycle de KREBS.

L’action de la vitamine D sur la diurèse n’a jamais été étudiée avec des résultats significatifs. Il nous a été donné d’observer que, chez les rachitiques, il existait presque toujours une augmentation notable de la diurèse sans l’influence de la vitamine D ; cette augmentation atteint environ 23%. Nous avons été surpris en étudiant un groupe de témoins non rachitiques de constater que la diurèse normale chez ces sujets à 44,5 ml/kg passait au bout d’une semaine à 50,7 ml/kg, au bout de quinze jours, à 61 ml/kg soit une augmentation de 38% sous l’influence du traitement vitaminique D.

3) Action de la vitamine D sur l’os. - Là encore les controverses sont nombreuses. Si, en 1954, ROBINSON signalait que l’apport direct de vitamine D n’avait aucun effet sur la calcification des cartilages in vitro, dès 1933, GRAB estimait que l’action de la vitamine D sur l’os était vraisemblable et FANCONI, en 1956, affirmait que cette action était certaine.

En fait, ce qui reste à l’origine de ces controverses, c’est que deux actions opposées sont observées.

Une première action constatée par CARLSSON, en 1952, après ALBRIGHT en 1946, est que la vitamine D semble capable de maintenir la calcémie en dissolvant le calcium osseux. VOGT et TONSAGER en 1949, écrivent que des doses fortes de vitamine D sont hypercalcémiantes en provoquant une mobilisation du calcium osseux LINDQUIST en 1955 pense qu’il existe effectivement une mobilisation du calcium osseux si la vitamine D est donnée à des rats soumis à un régime pauvre en calcium. Il est bien évident que cette action semble alors se rapprocher curieusement de l’action de la parathormone.

Mais, par ailleurs, une action tout à fait opposée est signalée par d’autres auteurs. NICOLAYS EN (1939) observe que des rats soumis à un régime équilibré ont une structure osseuse beaucoup plus régulière s’ils reçoivent de la vitamine D. MELLAMBY (1949) fait les mêmes constatations chez le chien. R E ED (1954) souligne l’influence favorable de la vitamine D sur l’orientation des cristaux osseux. Mais l’action favorable sur la minéralisation du squelette a été surtout démontrée par WILHELM : la suppression du calcium alimentaire et l’injection de calcium par voie veineuse entraîne une fixation calcique deux fois plus forte chez les animaux ayant reçu de la vitamine D que chez les animaux qui n’en reçoivent pas.

LANDTMANN (1944) par de très belles expériences in vitro, montre que le cartilage des animaux auxquels on a donné de la vitamine D (même à doses fortes), avant la mort, capte beaucoup plus de calcium que les autres. Ceci prouve d’une part, que la vitamine D agit directement sur l’os, d’autre part, que cette action a lieu même à fortes doses et que si ces doses sont capables de mobiliser le calcium osseux, c’est vraisemblablement après l’avoir fixé dans un temps préalable, enfin, que les différences entre doses fortes et faibles ne sont qu’apparentes, les doses fortes ayant d’abord l’action des doses faibles avant de la dépasser. Il apparaît de plus, que cette action est probablement liée à une forme modifiée de la vitamine D, étant donné le temps de latence qu’elle respecte avant de se manifester.

DIKSHIT et PATWARDHAN en 1952 confirment l’action de la vitamine D, donnée à des animaux avant la mort, sur la minéralisation in vitro de leur squelette et confirment également l’existence d’un temps de latence dans l’extériorisation de cette action osseuse de la vitamine.

HARRISSON (195o), GORDONOFF et MINDER (1952) notent également qu’avec un régime identique, le calcium 45 se fixe plus lentement sur le squelette des animaux rachitiques que sur le squelette des animaux qui ont reçu de la vitamine D.

On peut tirer de ces faits qui paraissent actuellement solidement établis qu’en présence d’un os déminéralisé, la vitamine D agira d’abord en favorisant le dépôt de calcium, mais que sur un os normal saturé en matières minérales ou récemment reminéralisé, la vitamine D, surtout si elle est donnée en excès, dépassant les besoins, est capable de mobiliser le calcium, de relever la calcémie ou de l’élever si elle était normale au départ.

Les modalités de cette action sur l’os sont encore assez mal précisées. WILHELM pense qu’il existe une substance soufrée dans le cartilage, substance soufrée qu’il est vraisemblable de rapprocher des mucopolysaccharides et que l’on n’observe que dans le cartilage normal. Cette substance est absente chez le rachitique et réapparaît au niveau de son squelette lorsqu’on lui donne de la vitamine D.

HELLER et STEINBERG (1951) observent au cours du rachitisme une disparition des granules glucido-protidiques dans les ostéoblastes et dans les ostéocytes et une réapparition de ces granules sous l’action de la vitamine D.

GERSH en 1952, COBB en 1953 interprètent ces constatations d’abord fragmentaires comme une altération de la substance fondamentale, peut-être une dépolymérisation des mucopolysaccharides, survenant par carence en vitamine D. On se retrouve encore en présence d’une action très semblable à celle de la parathormone mais, cette fois, dans un sens opposé.

DZIEWIATKOWSKI (1954) constate que la fixation du soufre marqué augmente au niveau de l’acide chondoïtine sulfurique après apport de vitamine D.

Tous ces faits plaident en faveur d’une action de la vitamine D sur la trame protéique et plus spécialement sur la substance fondamentale de l’os. Action qui, dans ce domaine serait, comme nous l’avons déjà dit, totalement opposée à celle de la parathormone.

D’autres auteurs ont mis l’accent sur les rapports entre la vitamine D et les taux d’acide citrique osseux. C’est ainsi que TULPUL et PATWARDHAN (1954) notent que le cartilage rachitique perd progressivement la capacité d’oxyder l’acide pyruvique ajouté in vitro.

NICOLAYSEN (1943) BURMEISTER (1952) constatent que chez le rat rachitique ni un apport d’acide citrique, ni un apport de phosphates, qui pourtant guérissent le rachitisme, ne parviennent à élever la teneur en acide citrique de l’os à des taux équivalents à ceux que permet d’obtenir la vitamine D. L’élévation de l’acide citrique osseux favorisant la minéralisation, il y aurait donc un deuxième mode d’action osseux purement minéral, à côté du mode organique que nous avons vu précédemment.

Tels sont les 3 points d’impacts actuellement solidement établis, leurs modalités et leurs conséquences parfois opposées. Il apparaît déjà que la vitamine D peut parfaitement agir dans des sens diamétralement opposés selon l’état de minéralisation du squelette, selon le fonctionnement des parathyroïdes. Nous verrons maintenant qu’en fait, l’action de la vitamine D dépasse probablement largement ces trois récepteurs. Nous allons voir en effet que la vitamine D est capable d’agir sur un certain nombre de métabolismes et il y a lieu d’insister fortement sur ce chapitre car il en découle probablement une notion importante, à savoir que la carence en vitamine D peut fort bien réaliser une maladie générale dépassant largement l’ostéodystrophie rachitique.

4) Action de la vitamine D sur le métabolisme général. - ACTION SUR LE MÉTABOLISME GLUCIDIQUE. - Depuis 1921, avec SUPPER on savait que le cartilage rachitique était pauvre en glycogène. Ceci est confirmé par FOLLIS en 1949, COBB en 1953, PARK en 1954. Ces auteurs constatent dans l’ensemble qu’il y a une diminution de la phosphorylase au niveau du cartilage rachitique mais on observe également que ces troubles dépassent le squelette ; il apparaît de plus en plus que la vitamine D agit sur tous les phénomènes de phosphorylation en dehors du squelette et de la paroi intestinale.

FREUDENBERG (1926) puis BROCK (1927) notent que le sang des nourrissons rachitiques et que le sang du foie des rats rachitiques sont capables d’inhiber la glycolyse in vitro. HENTSCHEL (1928) constate que l’addition de glucose phosphate rétablit cette glycolyse déficiente. RAIHA et FORSANDER (1954) pensent que la carence en vitamine D est capable de bloquer la phosphorylation de la vitamine B1.

Mais surtout, RUPP en 1955 constate que le sang du rachitique diminue le pouvoir de synthèse de l’acide adénoside-triphosphorique (ATP) ; WILH ELM dans un domaine très proche constate que le taux d’ATP du muscle des rats rachitiques est notablement diminué, de

l’ordre de 25%, et que l’administration de vitamine D ramène ce taux à la normale et même au-dessus en quelques jours. Ceci semble particulièrement intéressant car il apparaît dès lors que le syndrome musculaire caractérisé, comme on le sait, par l’hypotonie chez le rachitique peut parfaitement être lié à la carence en vitamine D.

ACTION SUR LE CYCLE DE KREBS - C’est HARRISSON et son école qui, les premiers, signalent que la vitamine D est capable d’augmenter l’acide citrique au niveau du sang circulant, de l’os et des urines. CARLSSON (1954) précise que chronologiquement c’est l’élévation dans le sang qui est la première et qu’elle est précédée par une brève diminution. STEENBOCK et BELLIN (1953) ne trouvent pas de corrélation nette entre l’augmentation de l’acide citrique urinaire et l’augmentation du pH, ni avec l’élimination urinaire du calcium et du phosphore. Ils constatent également que cette augmentation de l’acide citrique est indépendante du régime, et précisent qu’elle est liée à une augmentation de sa synthèse. Ils retrouvent cette augmentation également au niveau du coeur, de l’intestin et du rein.

HARRISSON (1958) estime que l’hypercitricémie observée est indépendante de l’action de la vitamine D sur la calcémie et indépendante de l’action anti-rachitique de cette même vitamine. En effet, la cortisone est capable de bloquer l’augmentation de l’acide citrique sans bloquer l’action anti-rachitique de la vitamine. Mais le point le plus intéressant est que cet auteur précise l’origine de cette élévation de l’acide citrique dans l’organisme des sujets traités par la vitamine D; en effet il semble que la vitamine soit capable de réduire l’oxydation de l’acide citrique et sa conversion en acide alphacétoglutarique par les mitochondries du rein.

Nous verrons plus loin que l’action toxique de la vitamine D a vraisemblablement la même origine.

ACTION SUR LE MÉTABOLISME PROTÉIQUE. - La carence en vitamine D semble capable chez le rat de provoquer une hypo-albumi-némie, une hyper-béta-globulinémie et une hyper-gamma-globuli-némie. Mais ces faits sont encore sujets à contestations ; il en est de même d’un dernier point qu’il serait capital de préciser ; l’action éventuelle de la vitamine D sur la moelle et le métabolisme du fer rendant peut-être compte de l’anémie hypochrome presque constamment observée chez les enfants rachitiques.

En conclusion, il semble important de souligner une fois de plus qu’avant d’attribuer à une carence associée, les perturbations générales observées avec une quasi constance au cours du rachitisme, il faut penser que la carence en vitamine D est vraisemblablement capable d’expliquer un grand nombre de signes associés aux symptômes osseux.

5) Action de la vitamine sur la croissance. — Il est généralement admis que la vitamine D n’agit qu’indirectement sur la croissance en favorisant la minéralisation du squelette et en redressant les courbures osseuses du rachitisme.

Pourtant depuis 1924 certains avis se sont dressés contre cette opinion : STEENBOCK le premier défend l’action de la vitamine D sur la croissance, démontre qu’elle existe chez le rat et le poulet et insiste sur la nécessité de la vitamine D pour obtenir une croissance normale. BECHTEL fait la même démonstration chez le veau et ROSENBERG (1942) estime que la vitamine D joue un rôle primitif et non pas secondaire sur la croissance.

JEANS plus récemment, en 1950, étudie deux groupes d’enfants ayant une absorption calcique et phosphatique identique et il note qu’il existe une bien meilleure croissance en “longueur“ dans le groupe recevant plus de vitamine D (l’autre en recevant aussi mais à doses moindres); il estime que la dose optima est d’environ 1000 unités par jour.

STEENBOCK et HERTING en 1955 ayant démontré le rôle bénéfique de la vitamine D sur la croissance, même avec un régime pauvre en calcium, soulèvent l’hypothèse d’un parallélisme entre la vitamine D et l’hormone somatotrope. Mais CRAMER (1957) étudiant les effets parallèles de l’hormone somatotrope et de la vitamine D démontre que l’action favorable des deux substances sur le poids et la croissance en longueur des os longs est totalement indépendante et qu’en particulier il est absolument impossible de les substituer l’une à l’autre.

Nous tenterons maintenant de grouper ces actions distinctes et de les coordonner sur un certain nombre de points précis.


MODALITÉS D’ACTION DE LA VITAMINE D


Nous abordons maintenant un des chapitres les plus complexes et nous serons amené à étudier séparément chacune des sphères d’action de la vitamine D en essayant ensuite dans un but synthétique de comprendre son action globale aussi bien chez le sujet sain que chez le rachitique.

Nous étudierons donc successivement les trois points d’impact classiques de la vitamine qui sont : l’intestin, le rein et l’os, mais également d’autres points d’impact récemment mis en évidence, intéressant de nombreux métabolismes et la croissance. Ensuite, nous essaierons, à la lumière de cette étude analytique de comprendre:

1) l’action chez le sujet normal,

2) le mécanisme de la carence,

3) l’action chez le rachitique,

4) l’action sur la calcémie,

5) les rapports avec l’hormone parathyroïdienne,

6) l’action toxique.


A. - ÉTUDE ANALYTIQUE B. - ÉTUDE GLOBALE



samedi 21 janvier 2012

MÉTABOLISME DE LA VITAMINE D


Son étude est particulièrement délicate et ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, c’est une des vitamines les plus difficiles à doser. Les méthodes actuellement utilisées pour le dosage de la vitamine D sont à la fois longues et délicates, qu’il s’agisse de méthodes chimiques ou photométriques du type de celles de SCHMALL ou de méthodes chromatographiques comme celles utilisées par GOUNELLE, ou qu’il s’agisse de méthodes biologiques basées sur la prévention ou le traitement du rachitisme expérimental et la fixation du calcium 45 chez les rats porteurs d’un tel rachitisme expérimental (ANT EN ER).

Deuxième difficulté : la formule chimique de la vitamine D est assez proche de celle de tous les autres stérols, et son repérage dans l’organisme peut être de ce fait rendu délicat, d’autant plus, encore une fois, qu’on connaît mal les formes d’utilisation de la vitamine D dont la formule est vraisemblablement différente de la vitamine que nous connaissons. Il y a bien entendu dans de telles études un intérêt considérable à utiliser un marquage de la vitamine D, ce marquage a pu être réalisé en employant le carbone 14 mais les études réalisées dans ce sens sont encore relativement peu nombreuses (KODICEK). Les transformations que subit la vitamine D.

entre sa forme d’apport et sa forme d’utilisation expliquent qu’il a toujours été très difficile de mettre en évidence son action directe in vitro et qu’en général cette action est mise en évidence après sacrifice de l’animal auquel elle a été administrée avant la mort. Ainsi, pour citer un exemple, in vitro l’apport de la vitamine D n’a aucune action sur la calcification du cartilage comme l’ont bien montré R0BINs0N et DIsKIT. Par contre, le cartilage se calcifie dans le sérum d’animaux normaux et le cartilage d’animaux ayant reçu des doses fortes de vitamine D avant leur mort capte beaucoup plus de calcium in vitro que les autres (LANDTMAN) mais si on ajoute directement in vitro du calcium sur les préparations du cartilage, on n’ob&elie serve aucune action particulière.

La vitamine D parvient dans la circulation selon deux voies : tout d’abord une d’origine cutanée, celle qui intéresse la transformation du 7-déhydrocholestérol en vitamine D3, sous l’influence du rayonnement solaire. La profondeur que peuvent atteindre les rayons ultra-violets étant de 2 mm. environ mais variant avec l’intensité du rayonnement et la pigmentation, il semble que l’absorption de la vitamine D ainsi formée puisse être immédiate.

L’autre voie d’apport est évidemment la voie digestive, à la suite d’ingestion de vitamine ou de vitamine D . Ces vitamines sont, en général, ingérées sous forme d’esters et, comme on le sait depuis longtemps, nécessitent pour une absorption correcte la présence de bile. D’autre part, on sait également que cette absorption est entravée par l’ingestion d’huiles minérales non absorbables. Il est donc intéressant de noter que l’ingestion d’huile de paraffine, qui est souvent donnée à des nourrissons dans un but laxatif, peut entraîner une absence totale d’absorption de la vitamine D administrée conjointement D . Celle-ci se dissout dans l’huile de paraffine, qui étant inabsorbable se retrouve dans les selles.

Dans la circulation, les taux sanguins de vitamine D varient de 6oo à 1650 UI/l. et l’on peut admettre comme chiffre moyen, un chiffre facile à retenir, de 1000 UI/l.

Pour THOMAS, la vitamine D incubée avec du sérum humain se déplace à l’électrophorèse dans la région des albumines et des globulines alpha. Il en déduit que cette vitamine se fixerait à ces fractions protéiniques pendant son transport. CHALK fait des constatations à peu près analogues en utilisant une vitamine marquée par le C14, dont la radioactivité après ingestion semble se retrouver pour sa plus grande part au niveau des albumines et des globulines alpha. Il est probable que cette forme de transport est encore différente de la forme d’utilisation, et par conséquent, que le taux sanguin de la vitamine D n’est pas forcément le reflet de l’équilibre de cette vitamine D dans l’organisme. Il n’en est cependant pas moins vrai que la constatation d’un taux élevé de vitaminémie coïncidant avec un rachitisme indiscutable pourrait avoir la valeur significative d’un trouble d’utilisation, En ce qui concerne la destinée de la vitamine D, on sait qu’il est classique de dire qu’il existe un stockage hépatique. En fait, ces affirmations vont à l’encontre des constatations faites couramment que le foie des mammifères est particulièrement pauvre en vitamine et l’on conçoit dès lors assez mal qu’un stockage puisse aller de pair avec cette pauvreté du foie des mammifères en vitamine D. CRUISKS HANK et KODICEK en administrant de la vitamine D per os constatent qu’au bout de deux jours ils retrouvent cette vitamine dans les surrénales, le foie, la rate, les reins et dans les poumons. Ceci lais- serait à supposer que contrairement à un stockage univoque, il semblerait bien plus logique d’admettre qu’il existe une large diffusion de la vitamine D à l’intérieur de l’organisme, ce qui, nous le verrons plus loin, serait parfaitement en accord avec un champ d’action extrêmement vaste.

En introduisant la vitamine D par voie veineuse, KODICEK constate qu’elle se retrouve d’abord dans le foie, mais qu’elle en disparaît rapidement et que par la suite, il retrouve de fortes concentrations dans l’intestin et au niveau du squelette.

Enfin, RAOUL et GOUN ELLE constatent qu’au bout de 30 minutes, la majorité de la vitamine D se retrouve dans les surrénales et qu’elle en disparaît en une à deux heures ; on trouve ensuite des proportions assez faibles dans le foie, proportions variant de l’ordre de 7 à 15% seulement si la dose administrée a été assez forte, on voit donc que malgré la multiplicité des travaux consacrés à ce sujet, les résultats sont encore relativement disparates et que l’on sait fort peu de choses de la destinée de la vitamine D dans l’organisme.

On en sait encore beaucoup moins sur son élimination qui, elle, reste totalement inconnue. On ne connaît pas ses formes de dégradation; on sait que son excrétion urinaire est nulle, ce qui n’est pas étonnant étant donné son caractère liposoluble.

Un dernier point particulièrement intéressant a mentionner en ce qui concerne le métabolisme de la vitamine D, est l’existence possible de facteurs antivitaminiques D. L’intérêt de ce problème mérite d’être souligné et ceci pour deux raisons. Dans le domaine pathologique il est probable que l’existence d’antivitamines pourrait peut-être dans certains cas, expliquer certains tableaux pathologiques assez difficiles à comprendre. Dans un tout autre domaine, l’existence d’antivitamines serait peut-être à la source de réactions sérologiques quantitatives qui pourraient rendre d’immenses services dans l’appréciation de la vitamine D circulante.

Mais en ce qui concerne ces anti-vitamines, les recherches n’ont pas encore abouti à des certitudes. Cependant, RAOUL dans les feuilles de végétaux a réussi à mettre en évidence une substance qui, à faible dose, semble réduire de 50 % l’action de la vitamine D3.

En ce qui concerne l’éventualité d’antivitamines D circulantes dans l’organisme animal, cette question a été paradoxalement laissée dans l’ombre depuis un certain nombre d’années. En fait, il ne s’agit pas d’une notion récente car on la retrouve chez les auteurs aile-mands, il y a peu près 20 ou 30 ans. C’est ainsi que BERGNER et SCHOLER (1932) sont parvenus à préparer et à tester des sérums anticholestérol et antiergostérol, et les sérums préparés leur ont permis de distinguer sérologiquement des formes normales et irradiées d’ergostérol en employant une réaction extrêmement simple de fixation du complément.

STEFL (1937) réussit à provoquer une protection limitée contre une dose mortelle de vitamine D par la création expérimentale d’antichamp vitamines D. Malheureusement, ces expériences n’ont pas été réalisées de nouveau et on ne sait quelle valeur on peut actuellement leur attribuer.

CALTABIANO (1939) constate que l’ergostérol irradié ou non est parfaitement capable de provoquer la formation d’anticorps fixant le complément dans l’organisme animal.




BESOINS ET SOURCES DE VITAMINE D

En ce qui concerne les sources, nous serons bref car le problème est pratiquement résolu et les sources de vitamine D sont actuelle ment bien connues, on sait également que la vitamine D est une des vitamines les moins répandues dans la nature En ce qui concerne ses besoins, par contre, des discussions persistent. Selon les auteurs, les doses prophylactiques vont chez le nourrisson de 6oo à 2500 unités par jour et l’on se trouve en présence d’une très grande variabilité.


SOURCES DE VITAMINE D


En fait, ce problème est insoluble car les variations sont importantes avec la latitude et le climat, avec la race et la pigmentation cutanée, avec l’habitat et le costume, avec la saison et avec la vitesse de croissance des individus considérés.

Il existe enfin probablement un facteur individuel qui reste à trouver mais qui peut jouer soit sur la faculté de la synthèse endogène, de la vitamine D3, soit sur la transformation de vitamine D en sa forme d’utilisation à l’intérieur de l’organisme. Il semble donc superflu de vouloir établir à tous prix une dose standard à utiliser du point de vue prophylactique pour prévenir le rachitisme du nourrisson. En fait, c’est une dose individuelle qu’il faut savoir établir sans chercher à se rabattre derrière une prophylaxie systématique standardisée. Il semble qu’avec un chiffre moyen de 1000 unités par jour, on soit vraisemblablement à l’abri des surprises désagréables, soit dans le sens d’une prophylaxie insuffisante, soit dans le sens d’un surdosage. Mais il ne faudra pourtant pas s’étonner si avec une telle dose, on se trouve, dans certains cas, au-dessous de la dose réellement prophylactique et l’on voit apparaître un rachitisme lorsque dans d’autres cas, une telle dose sera trop élevée chez certains sujets particulièrement sensibles à la vitamine D et entraînera des signes d’intolérance. Tout ceci rend en pratique très difficile la réalisation d’une prophylaxie alimentaire systématique et tous les pays qui se sont intéressés à ce problème et qui on cherché à le résoudre se sont bien aperçus de la difficulté qu’il comportait.



DONNÉES ACTUELLES SUR LA VITAMINE D

Il se dégage des grands ouvrages didactiques une impression de satisfaction tranquille lorsqu’on y aborde le chapitre du rachitisme et de la vitamine D. Pourtant depuis que Mac Collum en 1922 sépara de la vitamine A oxydable et thermolabile, le principe capable de guérir le rachitisme expérimental, de nombreuses équipes de chercheurs n’ont pas cessé de s’attacher à éclaircir les mécanismes d’action de la vitamine D, certains de ces mécanismes apparaîssant encore très mystérieux.

Cependant pour le clinicien les sujets de perplexité n’allaient pas non plus tarder à surgir. Ce fut tout d’abord le fait que certaines formes de rachitisme résistaient aux doses généralement considérées comme curatrices. Si dans certains cas, il s’agissait d’affections très différentes résistant effectivement à des doses mêmes énormes de vitamine D, dans d’autres cas il s’agissait de syndromes biologiquement proches du rachitisme commun et réagissant favorablement à la vitamine D à condition d’y mettre le prix et d’utiliser des doses considérables, habituellement toxiques chez le sujet normal. On s’aperçut en effet très vite que cette vitamine pouvait être dangereuse et que sa toxicité variait d’un sujet à l’autre. Si dans certains cas, à la suite de fortes doses, il était permis de parler d’intoxications, dans d’autres cas, les accidents s’observaient avec des doses relativement modérées, voire même avec des doses prophylactiques et on se devait dès lors de parler d’intolérance.

On fut également frappé par le fait que dans des conditions identiques, certains enfants devenaient rachitiques et d’autres restaient indemnes, et l’on soupçonnait alors que toute une voie métabolique exposée à des perturbations devait exister entre le moment où la vitamine D était introduite ou formée dans l’organisme et le moment où elle exerçait son action spécifique.

Son mode d’action d’abord supposé simple et uniforme fut étendu progressivement à des territoires qui, nous le verrons, sont de plus en plus vastes. Enfin ces modes d’action peuvent subir l’influence de facteurs divers et prendre alors des aspects différents parfois même opposés.