Les hernies et les éventrations diaphragmatiques ont été
étudiées de longue date chez l’adulte. Elles ne sont pas exceptionnelles chez
le nourrisson et l’enfant ; elles posent alors des problèmes diagnostiques et
thérapeutiques particuliers que nous allons étudier.
LE DIAPHRAGME NORMAL
Rappelons brièvement l’anatomie du diaphragme normal le
diaphragme forme une cloison musculo-tendineuse séparant la cavité thoracique
de la cavité abdominale. Il est en forme de voûte, allongé transversalement,
convexe en haut. Il est constitué par une série de muscles digastriques dont
les ventres musculaires s’interrompent sur la portion centrale tendineuse (le
centre phrénique), et dont la terminaison semble se faire en un point
diamétralement opposé à l’origine, sur le pourtour inférieur du squelette
thoracique.
Les insertions du diaphragme sont vertébrales, costales et
xyphoïdiennes :
Les origines vertébrales se font essentiellement sur les
deuxième et troisième vertèbres lombaires où elles constituent les piliers du
diaphragme.
Les origines costales se font par six faisceaux charnus sur
la face interne des 6 derniers arcs costaux : les origines sont uniquement
costales pour les trois derniers, chondro-costales pour le neuvième et enfin
uniquement chondrales pour les septième et huitième.
Les insertions xyphoïdiennes sont représentées par deux
minces faisceaux musculaires, s’insérant à la face postérieure de l’extrémité
inférieure de l’appendice xyphoïde.
Séparant le thorax de l’abdomen, le diaphragme est traversé
par de nombreux vaisseaux ou organes se rendant de l’un à l’autre L’orifice
aortique, limité par le bord interne tendineux des piliers du diaphragme, livre
passage à l’aorte et au canal thoracique.
L’orifice oesophagien est formé par l’entrecroisement des
fibres charnues internes des piliers. Il est entièrement musculaire, situé en
avant, au-dessus et un peu à gauche de l’orifice aortique. Il livre passage à
l’oesophage et aux deux pneumo-gastriques.
Enfin, en plein centre phrénique, à droite de la ligne
médiane, se trouve l’orifice de la veine cave inférieure.
CLASSIFICATION
I) Les hernies diaphragmatiques. A) Elles peuvent
survenir par un ORIFICE NORMAL DU DIAPHRAGME, telles les hernies hiatales à
travers l’orifice oesophagien.
B) Les hernies diaphragmatiques congénitales par un ORIFICE
ANORMAL DU DIAPHRAGME peuvent être de deux types :
a) Les hernies diaphragma tiques des coupoles ou hernies
postérolatérales sont de loin les plus fréquentes.
b) Les hernies rétro-costo-xyphoïdiennes.
2) Les éventrations diaphragmatiques sont
caractérisées par l’aplasie plus ou moins importante des éléments
fibro-musculaires d’une hémi-coupole (sans solution de continuité de celle-ci).
L’aplasie peut intéresser toute une coupole, ou seulement
une partie de celle-ci, réalisant alors une éventration diaphragmatique
partielle.
LES HERNIES
DIAPHRAGMATIQUES CÔNÔÉNITALES
A) LES HERNIES
DIAPHRAGMA TIQUES
PAR UN ORIFICE
NORMAL DU DIAPHRAGME
LES HERNIES HIATALES
Elles sont caractérisées par l’ascension, à travers l’hiatus
oesopha-gien, dans le médiastin postérieur, d’une partie plus ou moins
impor-tante de l’estomac.
On en distingue deux types essentiels :
I) Les rares hernies para-oesophagiennes, sont constituées
par l’ascension de la grosse tubérosité de l’estomac le long de la face gauche
de l’oesophage, le cardia restant intra-abdominal.
2) Les hernies cardio-œsophagiennes dites “ hernies
par glissement “ sont de loin les plus fréquentes. Elles sont caractérisées
par la situation intra-thoracique du cardia. Suivant l’importance de la hernie,
on distingue :
- Les grandes hernies droites, contenant la plus grande
partie de l’estomac et parfois le côlon transverse, se développant vers la base
thoracique droite ;
- Les petites hernies, uniquement médiastinales, avec
glissement dans le thorax, du cardia et de la partie haute de l’estomac ;
- Les cardias mobiles avec petite hernie médiastinale,
seulement intermittente
-La relaxation cardio-oesophagienne, ou béance permanente du
cardia avec reflux, peut être rapprochée des hernies hiatales par sa symptômatologie.
La PATHOGÉNIE DES HERNIES HIATALES est fort discutée. Si le
brachyœsophage primitif semble exceptionnel, une aplasie partielle des piliers
du diaphragme, des défauts d’accolements péritonéaux de l’oesophage abdominal
et de la grosse tubérosité gastrique, favorisent par contre l’ascension
gastrique.
La SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE DES HERNIES HIATALES
EST ASSEZ UNIVOQUE. Les vomissements en constituent l’essentiel ils
surviennent, en
règle, dès les premiers jours de la vie ; ils sont précoces, au moment
des
têtées ou peu après celles-ci ; de petites hémorragies, sont fréquemment
notées
au cours des vomissements elles traduisent l’oesophagite, elle-même
conséquence
du reflux gastro-esophagien. Ces vomissements, ces hémorragies, ne vont
pas
sans retentir rapidement sur l’état général de ce, enfants anémiés et
amaigris.
L’EXAMEN RADIOLOGIQUE PERMET FACILEMENT LE DIAGNOSTIC. Les
volumineuses hernies se caractérisent sur un cliché simple par une clarté
aérique ou hydro-aérique para-cardiaque droite (image.1) Un transit baryté
oesogastrique est indispensable pour préciser le volume de la hernie, le siège
sus-diaphragmatique du cardia et surtout le reflux facile gastro-oesophagien
(clichés de face, de profil, en O.A.D. et dans diverses positions : couché,
debout et en Trendelenburg).
Un lavement opaque dessine parfois une ectopie colique
associée dans les grandes hernies droites.
L’ÉVOLUTION DES HERNIES HIATALES est variable. Si
l’étranglement est exceptionnel, la répétition des hémorragies, l’importance
des vomissements, peuvent entraîner un état grave d’hypotrophie, rendant
l’enfant particulièrement sensible à la moindre infection intercurrente et
posant un problème vital.
L’œsophagite peptique constitue la complication majeure :
elle est la conséquence directe du reflux gastro-oesophagien ; elle évolue par
poussées successives, marquées par un état subfébrile, une recrudescence des vomissements,
des petites hématémèses. L’oesophagoscopie peut permettre d’apprécier
l’importance de l’oesophagite. Le traitement doit s’efforcer d’éviter
l’évolution vers la sténose peptique du bas-oesophage et parfois le
brachy-œsophage secondaire, lésions qui viennent singulièrement compliquer les
problèmes thérapeutiques.
Le TRAITEMENT DES HERNIES HIATALES peut être, soit médical,
soit chirurgical.
Le TRAITEMENT DIT MÉDICAL est en règle palliatif. Le
traitement postural en constitue l’essentiel, l’enfant étant maintenu en
orthostatisme. On associe de façon variable les thérapeutiques sédatives,
l’épaississement et le fractionnement des repas, les petites transfusions.
L’efficacité de ce traitement est variable ; elle se juge sur l’état général,
la courbe de poids, les contrôles radiologiques. Il est exceptionnel, sauf dans
les formes mineures, d’obtenir ainsi une disparition de la hernie et du reflux
gastro-oesophagien.
Si, malgré un traitement médical très patiemment surveillé,
et ce, quelque soit l’âge de l’enfant (en moyenne pas avant plusieurs mois),
les vomissements persistent, les hémorragies se répètent, la dénutrition
s’accentue ou si un début de sténose du bas-oesophage apparaît, l’indication
opératoire est formelle.
Les TECHNIQUES CHIRURGICALES, les voies d’abord, sont
nombreuses. Notre préférence va à la voie d’abord thoracique gauche. Il faut
réduire la hernie, rétrécire l’hiatus-oesophagien, éviter le reflux
gastro-oesophagien. La reconstitution de l’angle de His
(oesophagocardio-tubérositaire), semble capitale pour atteindre ce dernier but.
B) LES HERNIES
DIAPHRAGMA TIQUES PAR UN ORGANE
ANORMAL DU
DIAPHRAGME.
I) LES HERNIES
POSTÉRO-LATÉRALES DES COUPOLES
Il s’agit là d’une malformation diaphragmatique caractérisée
par une solution de continuité au niveau d’une coupole diaphragmatique,
laissant librement, communiquer sans interposition de séreuse, c’est-à-dire
sans sac herniaire, le contenu thoracique et le contenu abdominal. Ce sont des hernies
particulièrement graves, entraînant des troubles immédiats chez le
nouveau-né. Le diagnostic doit en être fait rapidement afin de mettre en oeuvre
le traitement chirurgical qui est seul de mise.
La malformation frappe à peu près également les deux sexes.
Elle est dans la grande majorité des cas isolée, sans autre malformation
associée.
Pour en comprendre l’anatomie exacte, il est utile de
rappeler brièvement QUELQUES NOTIONS EMBRYOLOGIQUES DU DIAPHRAGME Chez le jeune
embryon, les parties abdominales et thoracique du corps, communiquent largement
: la partie ventrale du diaphragme dérive du septum transversum qui sépare le
coeur des viscères abdominaux et va donner naissance aux faisceaux sternaux et
costaux antérieurs du diaphragme et à la plus grande partie du centre
phrénique.
En arrière, le diaphragme se développe à partir des piliers
de Uskow (éléments mésodermiques de la partie supérieure du mésentère dorsal).
Deux brèches postéro-latérales, appelées canaux
pleuro-périto-néaux ou foramen de Bochdalek, sont comblées plus tardivement,
vers la huitième semaine, par une membrane double, plèvre en haut, péritoine en
bas; entre ces deux séreuses, apparaîssent des éléments musculaires qui
complètent le diaphragme.
En même temps, on assiste au développement de l’anse
intestinale primitive :
- De la 6e à la 10e semaine, elle se
développe dans un diverticule antérieur de la cavité coelomique (ou coelome
extra-embryonnaire) à la base du cordon ombilical.
- Après la dixième semaine, la cavité coelomique s’aggrandit
et le coelome extra-embryonnaire disparaît progressivement.
Deux anomalies de développement de l’embryon peuvent
expliquer la constitution d’une hernie postéro-latérale d’une coupole :
- Retard ou absence de fermeture des canaux
pleuro-péritonéaux alors que l’anse intestinale primitive réintègre la cavité
coelomique.
- Réintégration prématurée avant la huitième semaine de
l’anse intestinale primitive dans la cavité coelomique.
Dans l’un ou l’autre de ces deux cas, l’anse intestinale
primitive est mobile et les accolements péritonéaux ne se sont pas encore
pro-duits : elle peut pénétrer la cavité thoracique par le foramen de BOCHDALEK.
La hernie postéro-latérale est beaucoup plus fréquente à
gauche qu’à droite à cause de la situation sous-diaphragmatique du foie.
Les hernies droites s’accompagnent en effet parfois d’une
omphalo-cèle avec ectopie hépatique.
L’orifice herniaire siège pratiquement toujours au niveau de
la partie postérieure et latérale de l’hémicoupole au voisinage du pôle
supérieur du rein. Ses dimensions sont très variables, le plus souvent de 3 à 5 cm. de diamètre et intéressant environ le tiers de
la surface de l’hémicoupole. Mais parfois, l’orifice herniaire est plus vaste,
pouvant au maximum intéresser la quasi totalité d’un hémi-dia-phragme.
L’orifice est ovalaire dans le sens transversal. Ses bords
sont nets en avant et latéralement. A l’opposé, en arrière, l’aplasie diaphragmatique
semble au premier abord totale, la séreuse péritonéale se
continuant sans démarquation aucune avec la séreuse
pleurale. En fait, une dissection précise permet le plus souvent
d’individualiser à ce niveau une étroite bande de tissu diaphragmatique se
prêtant aux sutures.
Les viscères herniés dans le thorax, représentent la totalité
de l’anse intestinale primitive (Dor) c’est-à-dire l’intestin grêle dans sa
totalité, et le segment de côlon compris entre l’angle iléo-coecal et l’angle
colique gauche. C’est donc la partie de tube digestif située entre deux points
fixes : l’angle duodéno-jéjunal et l’angle colique gauche c’est la partie du
tube digestif qui au cours du développement embryologique reste le plus
longtemps mobile et subit les phénomènes normaux de migration et de rotation.
C’est pourquoi DOR a proposé d’appeler ce type de hernie diaphragmatique “
hernie de l’anse intestinale primitive “.
Le duodénum est le plus souvent en place de façon normale,
on rencontre parfois l’anomalie de rotation intestinale dite “ de mésentère
commun “ : l’angle duodéno-jéjunal est alors absent et situé à droite de
l’artère mésentérique supérieure.
L’estomac ne se trouve pratiquement hernié que dans les
larges hernies de la coupole gauche.
La rate est fréquemment retrouvée dans l’hémithorax gauche.
Par contre, la queue du pancréas l’est plus rarement. Le foie peut lui aussi
être partiellement hernié dans le thorax dans les hernies gauches, on retrouve
tout ou partie du lobe gauche; dans les hernies des coupoles droites, la hernie
du foie n’est nullement constante.
Enfin les organes rétro-péritonéaux, rein et surrénale
peuvent être partiellement herniés dans le thorax.
L’absence de sac herniaire est un fait caractéristique des
hernies postéro-latérales des coupoles la séreuse péritonéale se continue
directement avec la séreuse pleurale ; l’intestin hernié dans le thorax est en
rapport direct avec le parenchyme pulmonaire.
LES CONSÉQUENCES ANATOMIQUES de la hernie diaphragmatique
sont faciles à comprendre
Les parois de l’hémithorax contenant la hernie sont
distendues par le contenu herniaire. Si cette distension est relativement
modérée pour la paroi costale, par contre, coeur et médiastin apparaîssent
refoulés du côté opposé.
Le poumon correspondant est réduit à l’état d’un moignon
plein, parfois difficile à reconnaître et complètement exclu du point de vue
fonctionnel ; mais il n’existe pratiquement jamais d’agénésie de ce poumon et
la réexpansion pulmonaire est toujours possible. Enfin, il n’existe jamais
d’ahérences anormales entre les anses intestinales et le poumon ou les parois
de la cavité thoracique.
A l’opposé de la cavité thoracique distendue, l’abdomen est
plat et partiellement déshabitée il ne contient en règle que l’estomac, le
duodénum, le pancréas, le côlon gauche et le foie. Ces viscères sont en
position normale.
LES SIGNES CLINIQUES de la hernie diaphragmatique d’une
coupole sont très caractéristiques
a) Nous prendrons pour type de description la hernie
diaphragma- tique de la coupole gauche chez le nouveau-né.
La cyanose et la dyspnée surviennent dès la naissance et
alertent vite l’accoucheur. Elles sont parfois si intenses qu’elles entraînent
une mort rapide malgré des essais inefficaces de désobstruction des voies
respiratoires. Cette dyspnée, et la cyanose qui l’accompagne, sont continues
avec redoublements paroxystiques et, fait caractéristique, sans crise de toux
ce qui les différencie de la cyanose et de la dyspnée des fistules
trachéo-œsophagiennes congénitales. La simple existence de cette cyanose et de
cette dyspnée dès les premières heures de la vie doit faire soupçonner le
diagnostic de hernie diaphragmatique congénitale.
Si le diagnostic n’est pas fait dans les premières heures de
la vie, on peut remarquer que cette cyanose et cette dyspnée augmentent lors
des tentatives alimentaires, augmentent également si l’on couche l’enfant du
côté droit. Accessoirement, on peut noter lors des tentatives alimentaires, des
régurgitations ou des vomissements.
A l’examen, on est frappé par le fait que l’hémithorax
gauche apparaît plus distendu et moins mobile que le droit. A l’opposé,
l’abdomen est complètement plat et rétracté. L’auscultation cardiopulmonaire
permet de reconnaître immédiatement un refoulement cardiaque droit important,
l’absence de murmure vésiculaire du du côté gauche, exceptionnellement
l’existence de bruits hydroaériques de ce côté.
Un examen clinique correct permet donc de soupçonner
fortement une hernie diaphragmatique de la coupole gauche.
EN FAIT, SEUL L’EXAMEN RADIOGRAPHIQUE PERMETTRA DE
L’AFFIRMER. On ne doit pas parler d’anoxie d’origine centrale, d’immaturité
pulmonaire, ou de cardiopathie cyanogène probable avant cet examen. Un simple
cliché radiographique de l’ensemble du thorax et de l’abdomen de face et de
profil suffit : (image. 2).
- De multiples petites images claires arrondies ou
polyédriques occupent la quasi totalité de l’hémithorax gauche jusqu’à
l’extrême sommet. Ces images claires sont parfois absentes les premières heures
de la vie. Elles sont ensuite variables suivant le moment de l’examen. Elles
évoquent d’emblée la présence d’anses intestinales dans la cavité thoracique.
- Le parenchyme pulmonaire gauche apparaît refoulé en haut et
en dedans par la masse intestinale.
- L’ensemble du médiastin est complètement refoulé vers la
droite, ce qui sur les clichés est particulièrement visible pour le coeur et la
trachée.
- La radiographie de l’abdomen montre dans l’ensemble un
abdomen opaque avec l’absence des bulles gazeuses intestinales et si l’estomac
est hernié dans le thorax, l’absence de poche à air gastrique.
- L’administration de bouillie barytée ou d’un lavement
opaque, est inutile pour le diagnostic et dangereuse pour l’enfant. Dans le cas
où cet examen aurait été pratiqué, et l’un et l’autre permettent d’objectiver
la situation exacte des viscères herniés (image. 3 et 4).
Quand à la solution de continuité d’une partie de la coupole
diaphragmatique gauche, elle est le plus souvent impossible à mettre en
évidence sur les clichés radiographiques, mêmes pris en diverses positions. Le
fait important à noter est l’absence de surélévation de la coupole
diaphragmatique gauche, ce qui permet un diagnostic différenciel facile avec
les éventrations diaphragmatiques gauches.
b) La hernie diaphragma tique des coupoles chez le
nourrisson et l’enfant.
Si le diagnostic de hernie diaphragmatique, n’a pas été
porté dans premiers jours de la vie, le tableau clinique, quoique encore grave,
revêt une allure moins dramatique. Il est caractérisé par une symptômatologie
d’emprunt, variable suivant les cas, simulant une affection respiratoire,
cardiaque ou digestive.
L’intensité de la dyspnée, avec tirage sus et sous-sternal,
de la cyanose, peuvent faire croire à une affection pulmonaire ou cardiaque.
Ailleurs, les troubles respiratoires sont relativement
discrets, mais surviennent surtout au cours des repas. Des régurgitations ou
des vomissements fréquents, peuvent attirer l’attention sur le tractus
digestif. Plus exceptionnellement, on peut rencontrer des formes anémiques ou
syncopales.
Dans tous ces cas, c’est un examen radiographique simple du
thorax et de l’abdomen qui permet en règle le diagnostic. Au besoin, dans ces
formes vues tardivement, un transit ou un lavement baryté permettent d’affirmer
la hernie diaphragmatique et d’éviter une erreur de diagnostic avec une
affection pulmonaire (kyste pulmonaire congénital, staphylococcie pulmonaire),
cardiaque ou digestive (imagr. 5).
L’ ÉVOLUTION D ES H ERNI ES DIAPHRAGMATIQU ES CONGÉNITAL ES
NON
OPÉRÉES est en définitive particulièrement grave au point de
vue vital. Des examens nécropsiques plus fréquents de nouveaux-nés
décédés immédiatement après la naissance permettraient
vraisemblablement de trouver une proportion notable de cas non diagnostiqués.
HELDBLOM, dans une revue de 210 observations de hernies
diaphragmatiques congénitales non opérées, notait une proportion de 158 décès
avant l’âge de i an. La mort survient dans un tableau d’asphyxie aigu,
favorisée parfois par une infection pulmonaire surajoutée, suite d’une fausse
route alimentaire.
L’étranglement herniaire est une complication relativement
rare de ce type de hernie. Le tableau clinique est celui d’une sub-occlusion
intestinale haute, sans ballonnement abdominal important. Là encore, un examen
radiographique correct doit permettre facilement d’en faire le diagnostic.
LE TRAITEMENT des hernies diaphragmatiques congénitales des
coupoles est essentiellement chirurgical. Il a pour but, par la réduction dans
la cavité abdominale des viscères herniés et la reconstitution du diaphragme,
de permettre des fonctions respiratoire et digestive normales. Il doit être
entrepris d’extrême urgence chez le nouveau-né, la mort subite étant toujours à
redouter.
LES SOINS PRÉ-OPÉRATOIRES seront donc particulièrement
brefs; une oxygénothérapie intensive, la pose d’une sonde dans l’estomac et la
dénudation d’une veine seront les gestes essentiels qui prépareront
l’intervention.
L’anesthésie est de toute évidence une anesthésie générale
avec intubation trachéale.
LA VOIE D’ABORD est discutée par de nombreux auteurs. Elle
peut être abdominale, thoracique ou thoraco-abdominale :
- Certains auteurs, avec Koop, se déclarent partisans de la
voie d’abord thoracique : La thoracotomie rapide fait cesser immédiatement
l’hyperpression thoracique et facilite l’oxygénation dès le début de
l’intervention. La réduction de la rate, lorsqu’elle est herniée dans le thorax
s’effectue facilement, sans risques de rupture de son parenchyme ou
d’arrachement de son pédicule vasculaire. Enfin, la réparation diaphragmatique
est plus aisée, la fermeture de la paroi thoracique plus sûre et les risques
d’éviscération post-opératoire par là même éliminés. En cas d’arrêt cardiaque
per-opératoire, le massage cardiaque peut-être immédiatement entrepris.
En fait, les difficultés de réduction des anses intestinales
et l’impossibilité de les remettre sûrement en bonne place dans la cavité
abdominale, entraînent des risques d’occlusion post-opératoires. Ceux-ci ont
fait abandonner à la majorité des chirurgiens la voie d’abord thoracique.
- La voie d’abord idéale nous semble être la voie d’abord
abdominale par incision para-médiane sus et au besoin sous-ombilicale.
Cette voie permet un abord aisé sur le diaphragme à condition de s’aider au
besoin d’une section du ligament triangulaire du foie. La réduction des
viscères herniés est facile, étant donnée l’absence d’adhérences thoraciques ;
elle est plus rapide que par voie thoracique. La voie d’abord abdominale a
surtout l’immense avantage de pouvoir vérifier de façon parfaite l’ensemble du
tractus digestif, en particulier de vérifier la disposition mésentérique ;
éventuellement, certaines brides péritonéales anormales peuvent être
sectionnées, évitant ainsi nombre d’occlusions post-opératoires.
L’intervention par voie d’abord abdominale, comprend donc
les TEMPS OPÉRATOIRES SUIVANTS, dans la hernie diaphragmatique de la coupole
gauche, la plus fréquente:
1) Réduction des viscères herniés. - Cette réduction
est souvent facilitée par l’introduction à travers la brèche diaphragmatique
dans la cavité thoracique d’une petite sonde de Nélaton afin d’annuler le vide
intra-thoracique. La réduction de la masse intestinale se fait par tractions
douces et progressives. La réduction de la rate lorsqu’elle est herniée,
demande patience et douceur afin de lui faire franchir la brèche
diaphragmatique, dans son grand axe, sans traction excessive de son pédicule
vasculaire.
2) La fermeture de l’orifice diaphragmatique. - Cette
fermeture demande une dissection parfaite des bords de la brèche, en
particulier du bord postérieur. Pour le bien dégager, il faut d’abord inciser
la séreuse qui le recouvre, afin de séparer la plèvre du
péritoine.
En cas d’ectopie partielle du rein et de la surrénale,
ceux-ci seront refoulés de haut en bas vers la cavité abdominale. Si le bord
postérieur de la brèche diaphragmatique a pu être correctement disséqué, la
fermeture simple de la brèche diaphragmatique est réalisée aux points séparés
de fil non résorbable, (fermeture transversale ou en T) En cas d’aplasie
importante de ce bord, le bord antérieur de la brèche diaphragmatique, peut
être amarré à la paroi postérieure du thorax en regard de la huitième côte.
Dans les cas exceptionnels, où la brèche diaphragmatique intéresserait la
presque totalité de la coupole, certains artifices plastiques (laçage cutané,
prothèse), peuvent être nécessaires.
3) Vérification de la disposition intestinale : il
n’est pas exceptionnel de rencontrer des brides péritonéales anormales, qu’il
faut libérer de bout en bout de l’intestin, afin d’éviter les occlusions
post-opératoires. Après libération de ces brides, la disposition des mésos et
des vaisseaux de l’intestin est soigneusement étudiée : au cas où l’angle
duodéno-jéjunal est absent et situé à droite de la mésentérique supérieure,
l’ensemble de la masse intestinale est réintégrée en disposition dite “ de
mésentère commun “ : l’ensemble du grêle à droite, et du côlon à gauche.
4) La fermeture de la paroi abdominale est un temps
opératoire souvent difficile, étant donné la dilatation intestinale qui suit la
réduction et l’étroitesse relative de la cavité abdominale. Nous n’avons jamais
eu à utiliser l’artifice proposé par LADD et GROSS. Ces auteurs conseillent en
cas de fermeture pariétale impossible, de ne suturer que la peau, remettant à
plus tard, la cure de l’éventration résiduelle.
Un cliché radiographique post-opératoire vérifie le
retour du médiastin en place normale et l’absence de pneumothorax résiduel trop
important. En ce cas une aspiration pleurale facilite le retour du poumon à la
paroi.
La cure chirurgicale de la hernie diaphragmatique permet
immédiatement une meilleure hématose. Néanmoins, LES SUITES POSTOPÉRATOIRES
demandent une surveillance rigoureuse. L’oxygénothérapie est continuée. Une
sonde gastrique est laissée en place durant le premier jour. La réhydratation
est pratiquée par voie intra-veineuse jusqu’à rétablissement du transit
intestinal. Il n’est pas exceptionnel de noter dans les jours suivant
l’intervention un syndrome de compression cave inférieure avec oedème des
membres inférieurs. L’abdomen est souvent ballonné et le transit lent à se
rétablir vers le 3e ou le 4e jour. De même, l’expansion
totale du poumon gauche demande plusieurs jours : on peut la suivre par des
clichés radiographiques.
Les résultats du traitement chirurgical des hernies
diaphragma tiques des coupoles, sont dans l’ensemble excellents ; à condition
de poser une indication opératoire rapide, l’intervention permet de sauver
l’immense majorité des enfants.
2) LES HERNIES
RETRO-COSTO-XYPHOIDIENNES
Elles comprennent tous les déplacements du péritoine ou des
viscères à travers une solution de continuité du diaphragme dont le bord
antérieur et formé par la paroi sterno-costale et qui peut
s’étendre latéralement du huitième cartilage costal droit au
huitième cartilage costal gauche.
Connues depuis 1769 (MORGAGNI), DENIZARD en 1951, en
réunissait 89 cas publiés dans la littérature. Les observations depuis lors se
sont multipliées.
L’orifice où s’engage la hernie peut être véritablement la
fente de LARREY, c’est-à-dire l’interstice normal existant entre les faisceaux
d’insertion sternaux et costaux antérieurs du diaphragme. Mais souvent,
l’orifice est plus large, soit que manquent les insertions sternales du
diaphragme, soit que manque le faisceau costal s’insérant sur la 7e côte. C’est
pourquoi, aux anciens noms de “ hernie de la fente de LARREY “, “ hernie de
MORGAGNI “, “hernie médiastinale antérieure “, on préfère actuellement le terme
de “ hernie rétro-costoxyphoïdienne “.
L’orifice herniaire est souvent latéralisé à droite, il est
allongé transversalement. Ces hernies comportent toujours un sac péritonéal
s’accolant plus ou moins à la plèvre et remontant dans le médiastin antérieur à
une hauteur variable, parfois jusqu’à la deuxième côte.
Le contenu est habituellement le côlon transverse ou
l’épiploon, exceptionnellement de l’estomac, de l’intestin grêle ou une partie
du foie.
Les hernies rétro-costo-xyphoïdiennes sont rares et LEUR
SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE PAUVRE. Elles ne sont souvent soupçonnées que chez le
grand enfant, voir même chez l’adulte.
Les signes digestifs sont faits de douleurs épigastriques,
évoluant plus ou moins par crises, variables suivant l’alimentation, la
position et les efforts, la gêne étant maximum en décubitus dorsal. Des crises
de hoquets, des éructations, des vomissements ou des crises de constipation
peuvent enfin attirer l’attention.
Parfois, les signes thoraciques dominent la scène,
caractérisés par des douleurs de type névralgie intercostale, des bruits hydro-aériques intra-thoraciques, voir même quelque gêne respiratoire.
L’examen clinique, n’apporte dans l’ensemble aucun signe important.
LE DIAGNOSTIC EST ESSENTIELLEMENT RADIOLOGIQUE. La radiographie du thorax de face, objective une image anormale, claire ou rarement opaque, arrondie ou ovalaire, à contour supéro-externe
convexe en haut et régulier, dont la limite inféro-interne se confond avec l’ombre hépatique et cardiaque. De profil, cette image anormale est très antérieure, immédiatement derrière la sternum.
L’examen baryté est nécessaire pour préciser le diagnostic. Un lavement baryté objective souvent une boucle du côlon transverse, intrathoracique (image. 6). Un transit baryté montre exceptionnellement l’association d’une hernie gastrique. On note plus souvent une dis-
crète plicature de l’estomac dont la grande courbure est
attirée en haut par le côlon transverse hernié.
L’examen clinique, n’apporte dans l’ensemble aucun signe important.
LE DIAGNOSTIC EST ESSENTIELLEMENT RADIOLOGIQUE. La radiographie du thorax de face, objective une image anormale, claire ou rarement opaque, arrondie ou ovalaire, à contour supéro-externe
L’examen baryté est nécessaire pour préciser le diagnostic. Un lavement baryté objective souvent une boucle du côlon transverse, intrathoracique (image. 6). Un transit baryté montre exceptionnellement l’association d’une hernie gastrique. On note plus souvent une dis-
La hernie contenant uniquement de l’épiploon est
caractérisée par une image radiographique opaque. Le pneumo-péritoine permet de
dessiner le sac herniaire et de confirmer le diagnostic (image. 7 et 8).
Celui-ci est en règle facile. Seul, peut se discuter sur les
images radiographiques, avant les examens barytés, le kyste
pleuro-péricardique.
Image 7. Hernie rétro-costo-xyphoïdienne. Radiographie de face, après pneumo-péritoine . |
LES COMPLICATIONS des hernies rétro-costo-xyphoïdiennes sont
exceptionnelles chez l’enfant (étranglement).
LE TRAITEMENT des hernies rétro-costo-xyphoïdiennes est
uniquement chirurgical. La voie d’abord la plus couramment utilisée est une
voie d’abord abdominale para-médiane sus-ombilicale. L’intervention consiste à
réduire le contenu herniaire. Le sac herniaire est réséqué si possible. Le
temps essentiel de l’intervention consiste à fermer l’orifice herniaire, après
avivement de ses bords. La suture directe des deux bords de l’orifice est en
règle possible, et il est rarement nécessaire d’avoir recours à une plastie de
fermeture.
EN CONCLUSION, les hernies rétro-costo-xyphoïdiennes sont
exceptionnelles chez l’enfant. Elles sont caractérisées par une symptômatologie
fonctionnelle discrète, un traitement chrurgical simple qui donne des résultats
fonctionnels et anatomiques excellents,
LES ÉVENTRATIONS
DIAPHRAGMATIQUES
Elles sont beaucoup plus rares que les hernies
diaphragmatiques et posent en règle des problèmes thérapeutiques moins
dramatiques.
1) PATHOGÉNIE. —Il s’agit en règle générale d’une
malformation diaphragmatique, atteignant tout ou partie d’une coupole
diaphragmatique, le plus souvent la gauche. Une paralysie phrénique (atteinte
médullaire, radiculaire ou tronculaire) est rarement retrouvée à l’origine de
l’éventration : il existe certains cas de paralysie obstétricale du phrénique
au même titre que les paralysies du plexus brachial, mais il s’agit là d’une
étiologie rarissime: 26 cas seulement ont été relevés dans la littérature par
MICHAUD en 1955.
2) ANATOMIE PATHOLOGIQUE. - a) L’éventration totale d’un
hé mi-diaphragme. - L’éventration de la coupole gauche est la forme la plus
commune : la coupole gauche surélevée, relâchée, distendue, souvent amincie,
atteint par sa convexité le niveau des premières
côtes en avant. Le poumon est refoulé en haut, le coeur à
droite, l’ascension de l’estomac d’abord verticale, s’accompagne vite d’un
volvulus gastrique qui amène la grande courbure en haut au contact du
diaphragme et coude le cardia à angle aigu sur l’oesophage. L’angle gauche du
côlon occupe la partie externe de la masse verticérale ectopique. Les organes
thoraciques et abdominaux ainsi déplacés, fonctionnent dans des conditions
mécaniques anormales.
En cas d’éventration diaphragmatique d’origine paralytique,
le diaphragme peut présenter un aspect macroscopique normal et une bonne
contractilité propre. A l’opposé, les éventrations d’origine malformative, les
plus fréquentes, s’accompagnent d’une aplasie très variable du diaphragme.
Celui-ci très aminci peut sembler simplement formé au prime abord par l’accollement
de la plèvre et du péritoine. Seul l’examen histologique permet de mettre en
évidence entre ces deux feuillets quelques fibres musculaires envahies par la
sclérose.
b) L’éventration partielle d’une coupole est plus
rare. Seules posent un problème thérapeutique les aplasies partielles assez
étendues en hauteur.
3) SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE. — Les éventrations
diaphragmatiques se manifestent rarement chez le nouveau-né par une
symptômatologie aussi bruyante que celle des hernies diaphragmatiques
congénitales.
C’est le plus souvent chez le nourrisson ou l’enfant plus
grand que l’existence de troubles digestifs, respiratoires ou apparemment
cardiaques, peut amener à faire pratiquer un examen radiographique et à
discuter le diagnostic d’une éventration diaphragmatique.
Les études radioscopiques et radiographiques des coupoles
diaphragmatiques de face, de profil et de trois-quart permettent de mettre en
évidence une éventration diaphragmatique plus ou moins importante et d’étudier
la mobilité de la coupole lors de mouvements respiratoires, l’éventration
augmentant à l’inspiration (image. 9).
L’opacification de l’estomac ou du côlon permettent de
préciser l’étendue de l’éventration diaphragmatique et d’en mieux fixer les
limites (image. 10 et 11).
En cas d’éventration diaphragmatique droite, contenant
uniquement le foie, un pneumo-péritoine associé au besoin à des tomographies de
face et de profil, permet de fixer exactement la situation de la coupole
diaphragmatique surélevée.
Un examen radiographique correct permet donc de porter un
diagnostic précis, et d’éviter une erreur diagnostique avec une affection
d’origine sous diaphragmatique (tumeur du foie) une affection pleuro-pulmonaire
ou médiastinale, une exceptionnelle tumeur du diaphragme.
4) TRAITEMENT. — Toutes les éventrations diaphragmatiques ne
relèvent pas de la thérapeutique chirurgicale. Certaines éventrations
diaphragmatiques partielles sont parfaitement tolérées et ne demandent aucune
intervention. Seules seront opérées les éventrations diaphragma tiques
importantes entraînant des troubles respiratoires ou digestifs
Les procédés purement palliatifs, telle une gastro-pexie
pariétale antérieure, ne nous semblent pas recommandables chez l’enfant.
Seule une intervention visant à reconstituer la continuité
du diaphragme est de mise.
La voie d’abord peut-être abdominale,
thoraco-abdominale ou thoracique la voie d’abord thoracique a notre
préférence.
Dans les éventrations diaphragmatiques partielles, l’excision
simple de la partie amincie suivie de sutures directes est possible.
En cas d’éventration diaphragmatique totale d’une coupole,
différents procédés chirurgicaux peuvent être utilisés : incision
antéropostérieure ou transversale de la coupole, suivie de suture en paletot ,
plicature du diaphragme avec ou sans lâchage cutané, ou application sur la
coupole relâchée d’une nappe prothéique à la fois souple et résistante amarrée
au pourtour de l’auvent costal par des fils non résorbables.